La compagnie low cost Ryanair de nos jours

Ryanair

Expansion de la compagnie Ryanair

En 2004, O'Leary prévoit que l'anarchie régnant désormais sur le créneau du low cost en Europe (les compagnies se sont multipliées) fera des victimes et que peu pourront survivre dans des conditions de rentabilité acceptables. Compte tenu de l'ancienneté et de l'expérience de Ryanair, il escompte que sa compagnie sera parmi les 2 ou 3 survivants de ce qu'il appelle « le bain de sang ». Ses prévisions s'avéreront exactes et on se dirigera, en Europe, vers un partage du marché aérien low cost entre Ryanair et easyJet à concurrence de 70% du total.

Cette même année 2004, une nouvelle opportunité s'ouvre : l'élargissement de l'Union Européenne. 3 pays baltes (Estonie, Lituanie, Lettonie), Pologne, Tchéquie, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, enfin Chypre et Malte rejoignent le marché européen. De nouvelles perspectives s'ouvrent alors à Ryanair qui vient juste de renouer avec les bénéfices après des années de pertes. Boeing est à nouveau sollicité pour fournir 70 appareils, tandis qu'une option pour 70 autres est inscrite, confirmée par Ryanair. Dans le même temps, O'Leary annonce que les comptes de Ryanair pour l'exercice 2003 présentent un profit en augmentation - tendance qui se confirmera les années suivantes puisque les 6 mois avril- septembre 2006 feront apparaître 329 millions de livres de bénéfice -, et que les 21,4 millions de passagers transportés au cours du même exercice sont à mettre en regard des 700000 des premières années d'exploitation, c'est-à-dire avant sa venue.

Devant le succès, Ryanair étudie la possibilité d'absorber sa compatriote Aer Lingus afin de fonder une compagnie irlandaise unique. Ryanair fait une offre en ce sens, mais Aer Lingus, dont le capital est pour partie détenu par l'État, la rejette. Aussi, Ryanair, poursuivant sa politique d'expansion, va-t-elle se tourner vers l'élargissement de son réseau en inaugurant de nouvelles bases. Brême et Düsseldorf (aéroport de Weeze) en Allemagne, Bristol, Alicante et Valence en Espagne et l'aéroport George Best de Belfast sont retenus. Le 16 mai 2006, Ryanair procède à une opération promotionnelle inédite. Dans des conditions particulières, il est vrai (passage par Dublin, nombre de destinations limitées), Ryanair met sur le marché un million de sièges à 1 centime d'euro ou 1 penny. Premier effet, le site web de Ryanair est saturé et tombe en panne, deuxième effet, l'ASA (organe de contrôle de la publicité) intime l'ordre à Ryanair de ne plus proposer ce type de promotion.

La réduction des coûts

Le propre des compagnies low cost est d'utiliser des appareils moyen-courrier - généralement des Boeing 737, seul modèle de Ryanair - et, par conséquent, de ne desservir que des lignes continentales pour un trajet n'excédant pas 3 heures. La raison en est que la recherche d'économie sur tous les postes possibles est incompatible avec un voyage intercontinental. Il n'est, en effet, pas envisageable de priver les passagers de nourriture pendant un long trajet ni de leur accorder un minimum de confort et de services. Cependant, Ryanair envisage, par le biais d'une entité distincte à définir, de mettre en service des vols long-courriers, notamment transatlantiques. Le concept consisterait en la création de 6 nouveaux « hubs » aux Etats-Unis sur des aéroports de second plan, desservis à partir des bases européennes existantes. Ainsi, Ryanair se placerait-elle en concurrence directe avec Virgin Atlantic. Il faudrait, aussi, que Ryanair monte une flotte d'Airbus A350 ou de Boeing 787, ce qui représente un investissement considérable et contredit, d'une certaine façon, la politique de l'appareil unique afin de rationaliser la maintenance.

Toujours dans un esprit d'économie, Ryanair imagine, en 2008, de demander à ses pilotes de limiter leur réserve de carburant. Le règlement international exige au minimum qu'outre la quantité nécessaire au trajet, la réserve prévoie 5% de carburant en plus, de même que de quoi rallier l'aéroport le plus proche et, de surcroît, que l'avion soit à même de tenir 30 minutes au-dessus de sa zone d'arrivée. Toute quantité de carburant supplémentaire reste à la discrétion des compagnies. Ryanair argue qu'elle n'a jamais connu d'incident par manque de carburant et qu'un poids allégé au décollage permet de couvrir une plus longue distance. Mais le risque de donner une mauvaise image de Ryanair au public laisse le projet à l'état d'étude.

Pour la première fois, en octobre 2008, Ryanair se heurte à l'intransigeance des autorités de l'aéroport de Valence - sa toute récente plaque tournante - quant aux modalités de leur collaboration. Ryanair décide alors de fermer les services correspondant à un « hub », mais conserve l'exploitation de certains vols. En terme d'emploi, la perte est de 750 postes. L'année se termine par une nouvelle offre d'achat d'Aer Lingus par Ryanair. Ryanair essuie un nouveau refus du gouvernement irlandais.

Une communication aggressive

En 2009, Michael O'Leary met en chantier de nouvelles idées. Il souhaite que la compagnie Ryanair ferme, à l'horizon 2010 - 2011, tous ses guichets d'enregistrement, l'objectif étant de réduire le frais de personnel. Les comptoirs d'accueil seraient remplacés par un point auquel les passagers pourraient déposer leurs bagages. Le concept se nomme « bag drop ». Parallèlement, Ryanair se trouve en désaccord avec l'aéroport de Manchester qui refuse de diminuer le montant des frais d'atterrissage. 9 des 10 lignes vers cette destination seront annulées. 600 emplois seront supprimés. Un conflit du même type commence avec l'aéroport de Shannon pas encore résolu début 2010. Ryanair refuse désormais les réservations au départ de cet aéroport pour certaines destinations et menace de fermer les lignes estivales vers Milan, Venise et Carcassonne.

Il entre dans la politique de Ryanair de susciter des innovations et, d’ainsi, provoquer le débat avec son cortège de publicité gratuite. Par exemple, Ryanair annonce que les toilettes à bord seront payantes (1 livre). Devant le tollé, Ryanair avoue qu’il ne s’agissait que d’une tentative médiatique et qu’elle conservera la gratuité de ses installations. Un autre aspect de la politique de Ryanair est l’agressivité vis-à-vis de la concurrence. Lors de son arrivée en Belgique, Ryanair s’était lancé dans une campagne contre Sabena, utilisant, de manière fort désobligeante, des affiches représentant le symbolique Manneken Pis avec une légende se rapportant à la compagnie belge. La campagne a été immédiatement interdite.

Autre initiative controversée : Ryanair envisagerait de faire payer ses clients au poids, c’est-à-dire qu’à partir d’un certain degré d’obésité, une surtaxe serait appliquée au motif du coût de la surcharge et de l’espace occupé. En dernier lieu, Ryanair étudie la possibilité de faire voyager ses clients debout. Plus exactement, la compagnie a demandé à Boeing d’effectuer une étude sur la possibilité qu’une partie des voyageurs – dans un premier temps une douzaine – soit transportée sanglée dans une position appuyée sur un support s’apparentant à un haut tabouret. Le prix du billet pourrait alors être intermédiaire entre le demi-tarif et la gratuité. Si Boeing parvenait à réaliser un modèle de ce nouveau type d’équipement, Ryanair serait prête à l’exploiter sur les plus courtes distances. Encore faudrait-il que les autorités de l’aviation civile acceptent ce mode de transport.

En dépit de certaines innovations qui peuvent sembler provocatrices ou, plus probablement, publicitaires, il n’en reste pas moins que Ryanair est une compagnie innovante qui a su se frayer une voie dans le ciel européen encombré et se placer en concurrente crédible des compagnies traditionnelles.

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